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Comment coexister entre espèces ?

Dernière mise à jour : 3 sept. 2019

Coexister, voilà l’image idéale d’une société antispéciste où animaux humains et non humains cohabiteraient sans rapport de force ou de domination. Co&xister, c’est une volonté d’aider des individus en souffrance en leur apportant considération, soin et bienveillance. Co&xister, c’est enfin un accompagnement des travailleur-euse-s de l’industrie animalière vers une reconversion professionnelle. Rencontre avec l’auteure et militante Virginia Markus, l’une des fondatrices de l’association.


La chienne Meli, adoptée des rues du Qatar, vit aujourd'hui d’amour et de bienveillance aux côtés de la poule rousse Masha, recueillie avec les ailes cassées de chez un privé qui voulait s’en débarrasser, et d’Artémis, Douce, Tagada et Détère, rescapées d’un élevage Migros.

Raconte-nous l’histoire de l’association Co&xister.

Virginia Markus : Co&xister est une association antispéciste, égalitariste et écologiste née en juin 2018 d’une volonté commune de mettre en oeuvre les valeurs de cohabitation entre animaux et humain-e-s. Nous avions à cœur d’accompagner cette coexistence en sortant du cadre purement théorique de l’antispécisme et d’agir ainsi en complémentarité aux associations existantes, en proposant des axes d’intervention qui compléteraient leur travail.

Nous avions à cœur d’accompagner cette coexistence en sortant du cadre purement théorique de l’antispécisme et d’agir ainsi en complémentarité aux associations existantes.

Parle-nous des membres fondateurs.

Avec Pierrick Destraz, Élisa Keller et Charles Mittempherger, nous partageons des valeurs communes : antispécisme, écologie, anticapitalisme, féminisme et antiracisme. Ensemble, nous avons eu un jour cette idée de créer une association qui mènerait différentes missions, notamment celle à moyen-terme de créer un sanctuaire pour animaux.

Pierrick est artiste. Il n’est à la base pas militant mais a toujours été animé par les valeurs que nous partageons. Végétarien depuis 30 ans, il a conscientisé sa posture antispéciste suite à notre rencontre et, depuis, milite à sa manière. Avec Co&xister, l’idée était de concrétiser cet engagement, puisqu’il a toujours été sensible à l’écologie et au sort des animaux.

Charles, Élisa, Virginia et Pierrick ont à cœur d’aider les espèces à mieux vivre ensemble et prendre soin les unes des autres.

Élisa est une activiste déterminée qui donne sa vie aux luttes auxquelles elle tient. Les animaux en priorité. Elle aurait pu terminer des études de droit, mais ses valeurs anarchistes, antispécistes et anticapitalistes l’ont menée vers une vie militante sans concession. Nous sommes amies depuis de nombreuses années et militons ensemble depuis le début. Il paraissait donc évident que l’on crée une association ensemble.

Charles est lui aussi militant depuis plusieurs années. En partageant les mêmes valeurs, il s’est joint à l’équipe pour créer l’association. Il avait entamé une carrière dans l’informatique avant de déconstruire ses préconçus sur la société et s’engager de manière plus active dans différentes associations afin de suivre au plus près ses convictions.

Je suis personnellement engagée en faveur des animaux depuis de nombreuses années, avec ce rêve d’enfant de créer un jour un lieu de vie qui accueillerait des animaux ayant échappé à l’abattoir. Avec Co&xister, je concrétise ce rêve en participant à un changement de société. Ainsi, en accompagnant des éleveur-euse-s vers une réorientation professionnelle ou en accompagnant des familles dans l’accueil d’animaux auparavant maltraités, je complète mon rôle d’activiste de terrain et d’auteure.


Quelles sont vos missions et comment les menez-vous à bien ?

Notre priorité est l’accompagnement à la cohabitation respectueuse des intérêts des animaux et des humain-e-s. Ainsi, nous allons à la rencontre des familles qui souhaiteraient accueillir des animaux ayant échappé à l’abattoir ou auparavant maltraités, afin de les accompagner au mieux dans cette vie commune. Nous effectuons donc des sauvetages d’animaux de toutes espèces et les mettons en lien avec ces familles d’accueil. Par ailleurs, nous accompagnons d’ancien-ne-s et d’actuel-le-s professionnel-le-s de l’élevage dans leur réorientation et cherchons à les amener à mettre en œuvre leurs valeurs profondes en abandonnant l’exploitation des animaux.

Neira et Elyan (né sans yeux), adopté-e-s des rues du Qatar

Nous organisons également des événements de type tables rondes, afin de débattre de la question de la coexistence, mais aussi de la résilience dont font preuve des humain-e-s et des animaux ayant vécu des traumatismes majeurs. Nous cherchons enfin à mettre en valeur les méthodes alternatives à la médecine vétérinaire clinique, afin d'apporter des soins plus globaux que la simple médication de certaines pathologies. Pour ce faire, nous avons développé des partenariats avec différent-e-s thérapeutes animalier-ère-s.

Comment faites-vous connaître votre association ?

Sur les réseaux sociaux, en donnant des conférences dans des milieux militants et en tenant des stands à des festivals antispécistes. Et par le bouche-à-oreille, bien entendu.


Notre priorité est l’accompagnement à la cohabitation respectueuse des intérêts des animaux et des humain-e-s.

Qui peut faire appel à vous ?

Toute personne souhaitant accueillir un animal auparavant maltraité ou ayant échappé à l’abattoir, tout-e éleveur-euse/boucher-ère/employé-e d’abattoir souhaitant changer de voie professionnelle en abandonnant l’exploitation des animaux, tout-e ancien-ne professionnel-le de la boucherie ou de l’élevage qui souhaiterait témoigner de sa transition, toute personne ayant connaissance d’un ou de plusieurs animaux en détresse qui auraient besoin d’une famille d’accueil. Nous collaborons également en partenariat avec des thérapeutes afin d’aider au mieux les personnes et les animaux en souffrance que nous accompagnons.


L’Ami et Neira, adopté-e-s des rues du Qatar

Comment agissez-vous sur le terrain ?

En aidant des animaux à échapper à la maltraitance, l’exploitation ou l’abattage, en les mettant en lien avec des familles, en accompagnant les familles dans leur cohabitation, en accompagnant d’ancien-ne-s éleveur-euse-s dans leur transition, en donnant des conférences, en tenant quelques stands et en menant des enquêtes dans des élevages par exemple.

Enquête au cœur de la filière avicole du groupe Micarna (Migros, Suisse) et sauvetage de 24 poules, par l’association Co&xister, avril 2019.


Des hangars fermés en permanence, des animaux sélectionnés génétiquement dont le corps est si lourd que les mouvements en deviennent difficiles, des dizaines de milliers d’individus qui vivent dans une promiscuité telle que l’agressivité et le stress sont constants. Des corps déplumés, une vie d’enfermement et quelques cadavres. Telle est la réalité des poules et des coqs dits parentaux dans les halles valaisannes du groupe Micarna, qui vante un respect de la vie et du bien-être animal en toute mauvaise foi, dans ses vidéos de présentation. Pour 24 poules, le destin a changé.


Nous pouvons changer le destin des millions d’autres. (Texte tiré de la page FB de Co&xister)

Quels sont vos projets pour le futur ?

Nous devrions acquérir, d’ici la fin de l’année, un terrain suffisamment grand pour y créer un sanctuaire pour ancien-ne-s animaux dits de rente. Pour cela, nous aurons besoin de soutiens financiers réguliers. Mais nous sommes suffisamment nombreux et nombreuses à être prêt-e-s à mettre la main à la pâte pour s’occuper des individus rescapés et accueillis sur place.

Des poules blessées sauvées d’un élevage Migros

Une cohabitation idéale ? Que chaque être puisse vivre selon ses intérêts fondamentaux, sans rapport d’exploitation, ni rentabilité. Il s’agirait de pouvoir collaborer spontanément sans chercher à tirer profit de qui que ce soit. Une vie où les valeurs fondamentales sont au cœur de notre quotidien.

Quelle serait pour toi une cohabitation idéale entre animaux humains et non humains ?

Une cohabitation dans laquelle chaque être peut vivre selon ses intérêts fondamentaux, sans rapport d’exploitation, ni rentabilité. Il s’agirait de pouvoir collaborer spontanément sans chercher à tirer profit de qui que ce soit. Si l’on peut utiliser le fumier des animaux pour procéder à de la permaculture, tant mieux. Si les cochons et les poules apprécient nos restes de nourriture et que l’on évite le gaspillage, tant mieux. Une vie où les valeurs fondamentales sont au cœur de notre quotidien.

Tu es toi-même auteure et militante, mais également accompagnatrice de résilience. Peux-tu nous en dire plus ?

Avec des études en éducation sociale, j’ai été amenée à travailler auprès de populations vulnérabilisées depuis plus de dix ans. J’ai donc développé des outils personnalisés pour accompagner des personnes en souffrance et j’apprécie pouvoir continuer à aider ponctuellement des humain-e-s qui auraient envie de surpasser leurs traumatismes pour avancer sur leur chemin de résilience. Parce que je n’aime pas le terme éducatrice, j’ai opté pour une terminologie plus juste et plus humble, qui est celle de l’accompagnement vers la résilience.

J’accompagne les personnes selon leurs besoins, objectifs et possibilités, ainsi que les animaux en les aidant à regagner confiance.

En d’autres termes, je propose aux personnes qui me contactent de les accompagner selon leurs besoins, objectifs et possibilités, dans un rapport horizontal. Et j’en fais de même avec les animaux : les accompagner dans leur nouveau lieu de vie, en écoutant leurs besoins et en les aidant à regagner confiance. Ce fut ma pratique principale lorsque j’exerçais en clinique vétérinaire au Qatar, et j’apprécie particulièrement pouvoir le faire ici.

Les militant-e-s antispécistes sont régulièrement fustigé-e-s, accusé-e-s d’être des extrémistes moralisateur-rice-s et liberticides. Qu’as-tu envie de répondre à ces contempteurs ?

Ce qui est imposé aujourd’hui dans nos sociétés, c’est la mise à mort forcée de milliards d’animaux sentients. Les militant-e-s antispécistes ne font que s’opposer à ce massacre auquel les animaux résistent, mais que la société préfère taire pour des raisons économiques, traditionnelles et égoïstes. Si l’on souhaite défendre le droit à la liberté, nous devons commencer par respecter le droit à la vie des autres animaux, victimes de notre comportement égocentrique et tyrannique d’êtres humains. En ce sens, nous ne faisons que relayer avec un langage humain, la résistance, les cris, les pleurs et les tentatives de fuite, des autres animaux, afin que leur discours soit entendu en société, partout il a été tu.

On ne peut plus décemment justifier des massacres sous prétexte de liberté de consommation ou d’action, sinon quoi nous devrions accepter les discours autour de la liberté de pratiquer l’excision, la lapidation et le viol. Personne n’autoriserait que le plaisir de quelques psychopathes prime sur le droit à la vie et à l’intégrité de leurs victimes humaines. Logiquement, nous devons cesser de croire qu’il s’agit d’un choix personnel que de produire, exploiter, tuer, commercialiser et consommer des animaux qui eux, n’ont pas été d’accord avec leur sort.

Nous ne faisons que relayer avec un langage humain, la résistance, les cris, les pleurs et les tentatives de fuite, des autres animaux, afin que leur discours soit entendu en société, partout il a été tu. On ne peut plus décemment justifier des massacres sous prétexte de liberté de consommation ou d’action, sinon quoi nous devrions accepter les discours autour de la liberté de pratiquer l’excision, la lapidation et le viol.

Association Co&xister

Pour soutenir financièrement l’association : Banque Alternative Suisse, Lausanne, IBAN CH1508390035402210004

Pour devenir famille d’accueil ou d’adoption : adoption@asso-coexister.ch

Pour devenir marraine ou parrain d’un animal recueilli : info@asso-coexister.ch

Pour offrir vos compétences thérapeutiques professionnelles à des animaux et personnes en difficultés : partenariat@asso-coexister.ch

Pour en savoir plus : le site internet et la page Facebook de l’association

Crédits photos : Co&xister

- propos recueillis par CL -

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