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Aïd el-Kebir : que le massacre commence !

S’il est bien un rituel religieux sordide, c’est l’égorgement en masse d’ovins et bovins à l’occasion de l’Aïd ad-Adha (« fête du sacrifice ») ou Aïd el-Kebir (« la grande fête »), dont les festivités dureront cette année du 11 au 15 août et marquent la fin du pèlerinage à La Mecque. Durant cette période, certains pays européens, comme la France ou la Belgique, vont même jusqu’à organiser ces abattages traditionnels dans leurs structures. De quoi laisser perplexe... Retour sur une pratique controversée jusque dans les rangs musulmans.

Les origines de l’Aïd el-Kebir

Pour prouver la force de sa foi envers son dieu, Ibrahim (l’équivalent d’Abraham chez les judéo-chrétiens) accepte d’offrir en sacrifice son fils Ismaël (Isaac). Dieu envoie Jibril (Archange Gabriel) qui, au dernier moment, remplace l’enfant par un mouton. Pour commémorer cet épisode, les pratiquants Musulmans s’adonnent chaque année au sacrifice de moutons (de six mois), de bovins (de deux ans et qui sont entrés dans leur troisième année lunaire) ou de chameaux (qui ont complété cinq ans).

Tués sans étourdissement préalable, les animaux sont massacrés dans le mépris le plus total de la Déclaration universelle des droits de l’animal adoptée à Londres en 1977, qui veut que « si la mise à mort d’un animal est nécessaire, elle doit être instantanée, indolore et non génératrice d’angoisse ».

Réactions et remise en cause

Si associations de défense des animaux et vétérinaires s’accordent à dire que cette méthode d’abattage entraîne des souffrances graves aux animaux, qui mettent plusieurs minutes à mourir en se vidant de leur sang, la pratique est également contestée par certains Musulmans eux-mêmes, qui proposent d’y substituer différentes choses : l’immolation au moment approprié (Ibn Qayyim al-Jawziyya, juriste) ou un don d’argent ou de nourriture pour les pauvres. Le végétarisme est même préconisé au quotidien, en complément à la renonciation de tout rituel sanglant au profit de dons, par des intellectuels soufis et chiites ismaéliens.

La dhabiha, abattage rituel prescrit par la loi islamique

L'abattage rituel concerne tous les animaux non marins. Une incision profonde et rapide est infligée à la gorge de l’animal, lui sectionnant les veines jugulaires et les artères carotides mais préservant la moelle épinière. Les convulsions ainsi entraînées permettent de drainer le sang (porteur de maladies selon les croyances islamiques) du corps de l’animal dans le but de rendre la viande plus hygiénique.

Si cette mise à mort en choque plus d’un, certaines études scientifiques (Prof. Schultz et Dr Hazim, Université d’Hanovre, Allemagne, ou encore Sylvie Pouillaude-Bardon, École vétérinaire de Toulouse, France) la considèrent au contraire comme la moins cruelle pour l’animal. Autre son de cloche du côté de l’Institut national (français) de la recherche agronomique dans son rapport sur les douleurs animales publié en 2009, qui révèle que la souffrance ante mortem a été évaluée à quatorze secondes en moyenne pour les ovins, cinq minutes chez certains veaux et même jusqu’à quatorze minutes chez des bovins adultes !

Une bataille judiciaire se livre en France avec, d’un côté, des arrêtés interdisant l’abattage rituel et, de l’autre, la mise en avant de motifs religieux pour justifier cette pratique. Des risques sanitaires sont également mis en évidence, certains fluides déversés (poumons, estomac) pouvant souiller les chairs. La dhabiha contrevient donc au règlement européen en matière d’hygiène des denrées alimentaires d’origine animale (chapitre IV, annexe III).

La souffrance ante mortem a été évaluée à quatorze secondes en moyenne pour les ovins, cinq minutes chez certains veaux et même jusqu’à quatorze minutes chez des bovins adultes !

Et en Suisse ?

Dans notre pays, l’abattage rituel est interdit depuis 1893 (« Il est expressément interdit de saigner les animaux de boucherie sans les avoir étourdis préalablement ; cette disposition s’applique à tout mode d’abattage et à toute espèce de bétail »), obligeant les pratiquants à consommer de la viande importée d’autres pays. Tous les recours visant à supprimer cette interdiction au nom de la liberté de croyance et de conscience sont rejetés, à une exception près : une autorisation exceptionnelle entre 1918 et 1920 lors de la Première Guerre mondiale en raison des difficultés d’importation.

Dans les années 1950, de nouveaux débats ont lieu sur le sujet. L’interdiction de l’abattage rituel est retirée de la Constitution pour être intégrée à la Loi sur la Protection des Animaux (LPA) de 1978. En 2002, la PSA (Protection suisse des Animaux) et la VgT (Verein gegen Tierfabriken) s’opposent à un assouplissement de l’interdiction au nom de la religion et lancent des initiatives populaires visant à étendre l’interdiction à l’abattage des volailles et l’importation de viande cacher.

Aujourd’hui, les volailles suisses peuvent toujours être égorgées.

- CL -

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